Serait pas temps de sit out, là ?
Image by Mrs Logic via FlickrComme prévu, la journée d'hier fut courte. Les récents soucis de sommeil ont décalé mon cycle pour m'amener à me réveiller en fin d'après-midi et être seulement capable de m'endormir en toute fin de matinée. Loin d'être un cycle optimal.
Dans ces cas-là, je ne connais pas de meilleur solution que de forcer un cycle de 36h. Pour faire que la fatigue nous emporte finalement en soirée. Et que le corps se réveille naturellement au matin. Ça ne signifie pas que la partie est gagnée mais si on prend alors un cycle diurne normal (c'est à dire actif, voir commentaires du post précédent), généralement, le cycle de sommeil se positionne là où il est le plus profitable.
Seul souci : le cerveau est dans un état "second" lors des dernières 12h du cycle de 36. Il n'y a pas assez de fatigue pour que ce soit préjudiciable (comme ce serait le cas sur un cycle de 60h par exemple). En tout cas pour qui ne doit pas se livrer à des activités à haut risque. Hélas, le poker rentre un peu dans cette catégorie...
J'ai fait mes plus belles sessions dans cet état de fatigue légèrement avancé, complètement "in the zone", à la limite de l'apnée. J'ai aussi connu les pires, avec le cerveau dans des zones étranges.
Pas possible de prendre trop de risques en ce moment donc je me suis contenté d'une session courte, sans trop de tables (le masstabling me semble totalement incompatible avec cette petite fatigue). Et je serais bien incapable de dire dans quelle zone j'étais exactement. Pris deux caves en une heure mais préféré jeté l'éponge dès que l'idée "et si on sit out ?" a pointé le bout de son nez dans un recoin de mon cerveau.
Je ne sais jamais d'où vient cette idée "et si on sit out ?". Mais je commence à comprendre que c'est le genre d'impulsion à ne pas prendre à la légère.
C'est peut-être seulement moi, c'est peut-être le cas de tout le monde.
C'est peut-être juste une idée à la con comme les milliers d'autres idées à la con qui traversent notre cerveau en permanence mais du genre dur à virer, qui reste gravée dans notre mémoire de joueur. Au point qu'on lui attribue ensuite, a posteriori, nos petites misères ("voila, je savais bien que je devais sit out"). Alors qu'on l'oubliera sans plus de remords si rien de nuisible ne se produit (cas plus rare, évidemment, au poker).
C'est peut-être une façon que notre cerveau, notre subconscient, a de nous informer qu'on ne joue pas optimal. Qu'on ne réfléchit/fonctionne pas de façon optimale. Que notre corps/cerveau a besoin de repos et surtout pas d'une activité cérébrale intense.
Quoi qu'il en soit, ce n'est pas une idée aussi facile à évacuer que les milliers d'autres. C'est une idée pernicieuse qui, lorsqu'elle traîne dans notre cerveau, rend par exemple difficile de jouer de façon optimale une grosse main qui se transforme en spot dangereux. C'est aussi une idée perverse, source de result oriented. Et génératrice de frustration : perdre un gros coup alors qu'on vient de penser à quitter la partie nous fait croire que notre cerveau savait qu'il fallait ne pas jouer la main; on avait le "correct feeling", on savait qu'il fallait pas, on l'a fait quand même, on s'en veut... tilt. Et tant pis pour l'absurde.
Pour un joueur de MTT, c'est une idée totalement étrangère. Aucun joueur de MTT ne pense jamais qu'il devrait sit out. Il peut penser qu'il a envie de pisser et qu'il est vraiment trop con d'avoir oublié de prendre une bouteille vide (évidemment, reste la solution de boire le 1/2 litre de Coca restant...). Mais il ne peut pas penser à sit out. Ce n'est juste pas une option. Et l'idée ne lui traverse jamais le cerveau.
En Cash, l'option est toujours disponible. Il est donc normal qu'elle passe parmi les centaines d'options envisagées par notre cerveau en permanence. Et, en fait, elle passe en permanence parmi les options envisagées/envisageables. Généralement, elle n'est qu'une idée comme les autres. Mais pas toujours. ET quand ce n'est pas le cas, elle devient vite une idée fixe.
Généralement, elle se fixe pour des raisons bien particulières. La principale étant qu'on ne joue pas dans de bonnes conditions. L'option est envisagée par le cerveau, trouve un écho favorable et se transforme en signal : on devrait quitter.
C'est le cas si on joue alors qu'on est fatigué. Ou qu'on pourrait à la place être avec des amis, en famille. Et que, en fait, on voudrait bien y être. Et chaque fois que, au fond, on préférerait faire autre chose. Notre cerveau pèse en permanence le bénéfice "émotionnel" de chaque chose que l'on pourrait faire. Si une autre option est émotionnellement chargée, son absence va nous peser de plus en plus, rendant ce qu'on fait (jouer au poker) de moins en moins satisfaisant.
C'est aussi le cas, souvent, quand on enregistre un début de session positif. Notre cerveau va chercher à préserver l'acquis même si cela n'a aucun sens à long terme (mais on sait bien que cerveau et long terme ne font pas bon ménage). Le risque de perdre ce qu'on a gagné est surchargé émotionnellement par rapport aux chances de gagner plus. Gagner 2x ne rend pas deux fois plus heureux que gagner x. Perdre cet x et terminer à 0 rend plus malheureux que simplement terminer à 0. Et infiniment plus malheureux qu'être perdant de x et terminer à 0...
Il est d'ailleurs bien plus rare de penser "et si on sit out ?" quand on est dans une session négative. Alors que...
Les raisons pour lesquelles l'idée "et si on sit out ?" passe du stade d'option à celui de "décision" sont nombreuses. Et pas toujours réalistes. Mais ça correspond toujours à un risque perçu par notre cerveau. Que ce risque soit réel (on est fatigué/énervé, on shoot une limite supérieure, on joue une table probablement trop dure pour notre skill...) ou juste émotionnel (perdre le gain actuel serait perçu comme négatif), une fois l'option devenue "décision", difficile de s'en défaire. Et encore plus difficile de jouer au mieux, de prendre les bonnes décisions rationnellement. Notre cerveau est passé en mode "émotionnel".
Personnellement, j'ai beaucoup de mal à me défaire de l'idée "sit out" une fois qu'elle s'est manifestée. J'ai une tendance "naturelle" à minimiser la durée de sessions positives et à insister sur les sessions négatives. C'est bien évidemment un leak, que je soigne... mais avec le plus grand mal.
Des années de MTT ont renforcé ce sentiment de satisfaction quand j'enregistre un gain "substantiel". Qui, inconsciemment, marque en plus, en général, la fin d'une session. La vie de joueur de MTT est ainsi faite : on démarre avec un max de tables qui vont en se réduisant; et la session se termine en général avec un seul MTT, deep, où se fera le bénéfice de la journée. Cela fait, call it a day (enfin, une fois l'adrénaline retombée).
Mais c'est aussi une tendance naturelle. Je me rappelle parfaitement de très vieilles sessions marathons à courir après un improbable comeback. J'ai beaucoup moins de souvenirs de sessions simplement positives même beaucoup plus récentes.
En même temps, ça ne m'inquiète pas outre mesure. J'ai le sentiment que ce genre de "stop win" psychologique est purement lié à notre état de confiance. Dans mon cas, et en ce moment, la confiance n'est pas au plus haut. Les grosses baffes encaissées une fois par semaine n'ont pas fait mal qu'à la bankroll. Et l'idée "sit out" pointe donc son nez assez rapidement. Deux caves en positif et la pression se fait trop forte. Incidemment, cela implique aussi que je suis attentif au résultat de la session... signe évident d'un manque de confiance.
Il m'est aussi plus difficile de me décider ensuite à une autre session. L'idée de terminer la journée en positif de deux caves est "satisfaisante". Elle ne l'est pas en réalité (financièrement), mais c'est ainsi que mon cerveau la perçoit. Peu importe la réalité où l'absurdité du raisonnement à long terme...
Quoi qu'il en soit, l'idée de sit out hier était probablement une bonne idée. Une des meilleures façons de lutter contre l'envie de sitout est déjà de ne pas jouer quand on est fatigué. Ou quand les idées sont ailleurs.
Reste ensuite à s'éviter les longues sessions perdantes. D'apprendre à sitout lors de celles-ci. Plus la perte est douloureuse, plus un petit gain se retrouve valorisé. Et donc plus l'envie de sit out devient émotionnellement intéressante.
Je sais que la solution est là. Pour ne plus penser à sit out alors que tout va bien, il me faut apprendre à sit out lorsque tout va mal. Réduire l'effet de sessions perdantes implique de réduire la charge émotionnelle des sessions gagnantes. C'est en cessant de vivre avec le spectre de la session qui bouffe tous les bénefs de la semaine que la confiance reviendra.
Y'a plus qu'à...
Et ce sera tout ce kipik pour aujourd'hui.
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# by lesage - 7:10 PM
L'un des grands mérites de ton blog, c'est de nous prouver comme il est difficile psychologiquement de vivre du poker. Tu devrais être payé et remboursé par la sécurité sociale et Adictel réunis.
Et merci pour tes billets toujours aussi criant de vérité et sincérité...
# by Ross_Minette - 8:35 PM
...criant de vérité et de sincérité, et d'humour.
J'avais moi bien pensé à vider la flask de whisky tronant devant mon écran mais... non et puis elle n'aurait jamais suffit, à moins d'ensuite la... heu non ^^
J'avais jamais réalisé que le fait de jouer une grosse série de mtt, nous amener à terminer la session sur un gain nous satisfaisant, et nous permettant de nous coucher (qui à dis la nuit ?) avec un sentiment de satisfaction.
TY Kipik !
# by ptitevoix - 1:23 PM
Perdre cet x et terminer à 0 rend plus malheureux que simplement terminer à 0. Et infiniment plus malheureux qu'être perdant de x et terminer à 0...
Il est d'ailleurs bien plus rare de penser "et si on sit out ?" quand on est dans une session négative. Alors que...
théorème fondamentale : plus on sera détaché du résultat quand on gagne , moins on sera affecté quand on perds ...
et un pti deuxième en passant
proteger son argent , pas sa main ^^ (soit on bet pour value , soit pour bluff mais jamais pour proteger sa main .. ta main a pas besoin d etre proteger)
ca me semble évident mais pas inutile à rappeler comme dit doyle : du moment qu on a jouer la main de facon optimal , le reste n a au fond aucune importance (le résultat)
# by Anonyme - 12:15 AM
Petite idée comme ça:
Si quand tu arrives à avoir un gain de plus d'une demie cave, tu quittes la table pour te diriger vers une autre, tu protèges ton gain et ne le remets pas "en jeu"? Non?
Tu joues sur PS donc tu as un choix de tables supérieur aux autres rooms. Et en plus, tu peux rechercher des joueurs. Donc mon raisonnement se base sur la chose suivante, vu que tu es revenu à un poker moins "industriel":
Tu repères le fish, ou plutôt les fishs (vu que tu joues en NL25 et NL50) les plus "juteux" de ta table et tu recherches leur présence sur d'autres tables. Tu en repères un sur 3 autres tables(exemple). Tu recherches ton deuxième fish et tu regardes si tu ne les trouves pas sur une table commune où tu n'es pas. Tu te mets sur liste d'attente si nécessaire et ferme la table où tu as fait ton gain supérieur à ta demie cave, pour la remplacer par l'autre.
Tu sauvegardes donc ton gain et gardes donc ton potentiel poissonneux. Si tu vois d'autres joueurs connus à cette table, ton tracker va immédiatement suivre, donc pas de problème.
Et 30 minutes plus tard (je crois que c'est le temps minimum pour retourner à une table sans montant minimum si tu avais enregistré un gain), tu retournes sur la première si tes fishs y sont encore présents.
En faisant tourner les tables durant ta session, tu sauvegardes tes gains et tu limites le facteur psychologique (de perdre ce que tu as difficilement gagné). Donc ton esprit est plus libre. Et tu verras, tes sessions te paraitront beaucoup moins monotones. Et donc plus longues et plus rentables.
Et concernant la citation de Brunson: facile à dire quand on est millionnaire et que quelque soit le résultat de ta session, tu rentreras avec ta voiture de luxe dans ton immense maison. Là, on parle bien d'un joueur qui peux difficilement se dire qu'il n'est pas à quelques caves près...
# by ptitevoix - 6:26 AM
Et concernant la citation de Brunson: facile à dire quand on est millionnaire et que quelque soit le résultat de ta session, tu rentreras avec ta voiture de luxe dans ton immense maison. Là, on parle bien d'un joueur qui peux difficilement se dire qu'il n'est pas à quelques caves près...
lol grosse bétise .. la philosophie est pas réservée aux gens aisé (financièrement)
c est la différence entre réussir sa vie et réussir dans la vie .. à méditer ds ce monde matérialiste ;)
et derniere chose c etait juste destiné à éssayer de lui redonner confiance en son jeu . éssentiel quand on s assois à une table ;)
# by Anonyme - 10:59 PM
ce n'était pas une attaque contre toi tu sais. Juste que Kipik se doit d'être un poil result oriented car lui, il a besoin de ces foutues 4-5 caves qu'il laisse filer en ne sauvegardant pas ses gains à chaque fois.
Et je sais que cette philosophie est vrai tout comme cette autre phrase de Brunson:
"Si tu sais que ton adversaire ne va pas suivre ta relance, tu te dois de relancer. Même avec rien."
Elle est bien vraie celle là. Mais bon.. pas facile de risquer de spew des euros dans des moves incertains non plus...
# by ptitevoix - 6:43 AM
est ce qu on parle de poker ?
# by Gerd - 11:27 PM
Great blog I enjoyed reaading
# by Gerd - 10:27 PM
Thanks for thiss
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